La Suisse ambitionne d’être climatiquement neutre d’ici 2050, c’est-à-dire de ne pas émettre une quantité de gaz à effet de serre supérieure à celle qui peut être absorbée de l’atmosphère par des moyens naturels ou techniques. Comment comptons-nous atteindre cet objectif « zéro émission nette » après le rejet de la nouvelle loi sur le CO2 lors des votations du 13 juin 2021 ? Cela n’est pas du tout clair, mais il est évident que ce sera impossible sans une transformation fondamentale des transports, parce que ceux-ci sont à l’origine de 32 pour cent des émissions de CO2 dans notre pays, dont près des trois quarts proviennent du trafic individuel motorisé. Malgré le succès des voitures électriques – dont la production et l’utilisation émettent aussi du CO2 –, il est essentiel de réduire fortement la mobilité individuelle à moyen terme.
Voilà un objectif tout sauf facile à atteindre, car il soulève une résistance énorme. Mais le bénéfice l’est tout autant; non seulement en raison de la protection du climat nécessaire et urgente, mais encore parce qu’il s’agit d’une chance unique de repenser notre environnement.
L’espace public est actuellement dominé par la voiture en maint endroit. Les infrastructures de transport occupent à peu près un tiers de la surface bâtie en Suisse, dont 90 pour cent par les routes et autoroutes. Sans les voitures, une surface immense s’ouvrirait à de nouveaux usages. La mobilité douce serait la première à en bénéficier, avec davantage de place pour des trottoirs, des pistes cyclables plus sûres et plus attrayantes, ainsi que des transports publics plus fluides. Une personne qui se déplace à pied, à vélo ou en transports publics utilise seulement une fraction de la place que prend une voiture. L’espace routier redevenu libre pourrait aussi servir à d’autres fins. Dans un pays où il ne reste presque plus de surface disponible, quel cadeau! On pourrait y créer des logements, des espaces verts, des terrains de jeu et tant d’autres choses.
Le processus de transformation a déjà commencé en plusieurs endroits, par exemple dans des villes comme
Paris ou Barcelone, qui veulent s’affranchir largement de l’emprise des automobiles. En Suisse, ce sont
les autorités lausannoises qui ont le plus d’ambition pour assurer une mobilité écologique. Elles souhaitent bannir les voitures à moteur thermique de la ville et réduire de moitié le trafic individuel motorisé d’ici 2030. Ce numéro de moneta vous dira, entre autres, comment atteindre cet objectif.
Katharina Wehrli,
rédactrice en cheffe