moneta: Anna-Valentina Cenariu, quelles sont vos tâches en tant que responsable du service Durabilité?
Anna-Valentina Cenariu: Au début de mon activité il y a un an et demi, je me suis entretenue avec tous les autres services. J’ai aussi examiné tous les statuts et règlements. Je cherchais à savoir ce que représente la BAS, où nous voulions aller et ce que nous faisions réellement. Sur la base de cette analyse, j’ai élaboré un document de stratégie qui définit les objectifs et mesures en matière de durabilité. J’applique aujourd’hui ces mesures en collaboration avec les services.
L’une de mes tâches consiste à veiller à ce que nous agissions de manière cohérente, à avoir la même compréhension de ce que le terme de durabilité signifie pour nous. Les fondements sont définis dans les Principes de la politique de placement et de crédit; il s’agit donc de les décliner dans le travail de tous les jours. J’examine quels sont les outils et manuels dont le personnel a besoin, et je rédige des guides pour l’activité quotidienne. Avec les crédits, par exemple, on doit pouvoir comprendre pourquoi nous finançons certaines entreprises et pas d’autres. Les employées et employés de longue date sont au point sur la question, mais nous devons donner des orientations aux nouvelles collaboratrices et nouveaux collaborateurs. Ma tâche consiste à définir les processus pour assurer davantage de transparence et de clarté.
Quels sont les défis spécifiques?
L’un d’eux réside dans le fait qu’en mettant quelque chose en œuvre dans leur domaine, les subalternes ou les cadres oublient parfois de demander ce que cela signifie pour l’ensemble de la Banque. Par exemple, quand nous excluons des sociétés de l’analyse d’entreprises parce que nous les considérons comme non durables, nous ne devrions plus nous procurer des biens ou des services auprès d’elles. Je dois donc toujours intégrer la perspective de la Banque dans sa globalité
Proposez-vous aussi des formations?
Oui. Le premier module pour les nouvelles employées et nouveaux employés aborde le thème «La durabilité à la BAS». On commence par se demander: D’où vient le développement durable? Comment le sujet a-t-il évolué au cours des cinquante dernières années? Ensuite, de manière ciblée: Qu’est-ce que cela signifie pour la BAS? Je propose aussi la série d’ateliers «La durabilité à midi», où je sensibilise le personnel au-delà de l’activité bancaire, en montrant par exemple comment se comporter en tant que consommatrice ou consommateur. J’ai également commencé à envoyer chaque trimestre un courriel «Astuces en faveur de la durabilité», sur des questions du type «Vivre sans plastique».
Vous avez évoqué la stratégie de durabilité que vous avez élaborée pour la BAS. Que prévoit-elle pour les années à venir?
Elle touche les domaines dans lesquels nous avons le plus d’impact en matière de durabilité. Premièrement, l’activité de crédit; deuxièmement, l’activité de placement et nos propres actifs financiers; troisièmement, la façon dont nous agissons avec notre personnel; quatrièmement, notre engagement vis-à-vis de la société; cinquièmement, l’écologie d’entreprise. La stratégie couvre également des questions transversales: comment communiquer et gérer le sujet de la durabilité? Comment évaluer notre impact durable? Au bout du compte, nous avons défini environ vingt-cinq mesures à concrétiser ces trois prochaines années. On les trouve dans le nouveau rapport de durabilité (voir encadré). A partir de 2019, nous ferons le point sur l’avancée des travaux dans le rapport de durabilité.
Quelles sont les mesures déjà appliquées?
Dans notre culture d’entreprise, nous souhaitons renforcer la gestion de la santé ainsi que le développement du personnel et de l’encadrement. En ce qui concerne les crédits, nous actualisons le Rating immobilier BAS©. La notation que nous utilisons aujourd’hui remonte à dix ou quinze ans et les exigences légales ont augmenté depuis lors. Nous avons donc décidé de le mettre à jour et de le rendre de nouveau plus visionnaire.
Y a-t-il d’autres mesures que vous jugez particulièrement importantes?
Dans ses statuts, la BAS déclare vouloir sensibiliser le public à des sujets comme l’économie, le système monétaire et la durabililté. Nous le faisons déjà bien avec moneta et les débats d’argent, mais ce n’est pas suffisant. Par ces deux biais, nous nous adressons avant tout à nos clientes et clients. Selon nos statuts, nous devons toutefois sensibiliser la société au-delà du cercle de notre clientèle. Nous souhaitons donc élargir nos activités de relations publiques. Il ne s’agit pas de prospection, mais d’une mission détachée de tout objectif commercial.Une autre mesure concerne la question de savoir comment évaluer notre impact. Je travaille dans un groupe de la Global Alliance for Banking on Values, où nous développons un modèle de base pour chiffrer l’impact des banques à orientation socio-écologique. A ce jour, nous regardons seulement où va l’argent et à quel point il profite aux secteurs d’encouragement, mais pas son impact durable.
Justement, comment évaluer l’impact social ou écologique?
Nous n’en sommes qu’au début. Il est assez facile de savoir, disons, combien de kilowattheures d’énergie renouvelable ou combien de mètres carrés de logements coopératifs nous avons financés. Ces chiffres existent. Il devient plus difficile de mesurer l’impact dans le secteur de la culture. Et l’exercice comporte des limites, parce qu’il serait regrettable de passer davantage de temps à calculer qu’à agir.
La BAS a un nouveau Comité de durabilité depuis trois mois. Quelles sont ses missions?
Le comité est à mes côtés en tant qu’organe de soutien et de suivi. Il existe depuis un certain temps déjà, mais ne comptait que des membres de la direction. J’ai soumis l’idée de le recomposer. Il réunit désormais des représentantes et représentants de tous les sites et services. Le comité se penche sur des questions de durabilité dans tous les services, par exemple quand nous concevons de nouveaux produits. Ou alors, il examine les documents de base que je prépare, parmi lesquels le nouveau guide d’approvisionnement. Sa tâche principale consiste à accompagner la mise en œuvre de la stratégie en matière de durabilité et à émettre des recommandations à la direction en cas de dilemme éthique.
Vous avez consacré presque toute votre vie professionnelle à promouvoir le développement durable. Qu’est-ce qui vous motive à faire cela tous les jours?
Le fait que je peux apporter ma propre contribution, améliorer l’environnement et faire évoluer la société. En fait, j’ai deux clients: la BAS en tant qu’employeuse à proprement parler d’une part, la société et la nature d’autre part. C’est un engagement bilatéral, car il faut que la BAS se développe de manière à pouvoir faire encore plus pour l’environnement et la société, même si ce n’est pas toujours facile. Dire que l’on veut être durable est une chose; agir en conséquence en est une autre. Il est humain de chercher à éviter les difficultés. Mon travail consiste à insister là-dessus et à rappeler que nous devons faire ce qui figure dans nos statuts, que ce soit agréable ou non.